La Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 3 avril 2024 que ne constitue pas une mesure discriminatoire l’attribution à certains salariés non-grévistes d’une prime exceptionnelle correspondant à un surcroît de travail ou à la réalisation de tâches en dehors de celles prévues par leur contrat de travail.
Quelques rappels
Le droit de grève est un droit fondamental, reconnu et protégé par la Constitution, le Code du travail et différents textes internationaux ratifiés par la France tels que le Pacte des Nations-unies du 19 décembre 1966 relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Charte sociale européenne du 18 octobre 1961 et la Charte sociale européenne révisée du 3 mai 1996, notamment.
En l’espèce,
Dans cette affaire, plusieurs salariés d’une société avaient exercé leur droit de grève lors d’un mouvement de grève.
Lors d’une réunion extraordinaire du comité d’entreprise d’une UES qui s’est tenue le 9 avril 2019, a été annoncé par l’employeur le versement d’une prime exceptionnelle à certains salariés non grévistes, attribuée « selon une surcharge exceptionnelle de tâches confiées à certains collaborateurs. Cette prime n’est pas liée à un résultat 2018 mais à des efforts supplémentaires durant les quatre derniers mois fournis par certains collaborateurs en dehors de leurs tâches habituelles. »
S’estimant victimes de discrimination dans l’exercice de leur activité syndicale et de leur droit de grève, les salariés et la Confédération générale du travail de la Guadeloupe (le syndicat) ont assigné, la société devant la juridiction prud’homale pour obtenir le paiement, à chacun des salariés, de certaines sommes à titre de rappel de salaire correspondant à cette prime exceptionnelle et de dommages-intérêts pour manquement par la société à ses obligations d’exécution de bonne foi et loyale du contrat de travail.
Par trois jugements du CPH du 22 septembre 2022, la société a été condamné à verser à chaque salarié un rappel de salaire au titre de la prime exceptionnelle. Le CPH a retenu que la société n’a pas fourni dans un certain délai, la fiche de poste et le contrat de travail de chaque salarié ayant bénéficié de la prime. Et également que le pouvoir de direction permet à l’employeur de modifier unilatéralement les conditions de travail des salariés, que les salariés non-grévistes ont exécuté les tâches demandées conformément aux ordres de l’employeur et que ce dernier leur a donc accordé un avantage salarial de manière discrétionnaire.
Par conséquent, le CPH considère qu’il existe une discrimination et condamne la société à payer à chaque salarié une certaine somme à titre de rappel de salaire correspondant à la prime exceptionnelle.
La société s’est alors pourvue en cassation.
La Cour de cassation ne suit pas le même raisonnement que le CPH et considère que ne constitue pas une mesure discriminatoire l’attribution à certains salariés non grévistes d’une prime exceptionnelle correspondant à un surcroît de travail ou à la réalisation de tâches en dehors de celles prévues par leur contrat de travail. Dès lors, le juge ne peut pas condamner l’employeur à verser une telle prime à tous les salariés non grévistes sans rechercher, comme il y était invité, si cette prime n’avait pas été versée à certains salariés parmi les non-grévistes, ayant accepté une modification temporaire de leur contrat de travail en raison de l’exécution par eux de tâches ne relevant pas de leurs fonctions, de sorte qu’elles constituaient un surcroît de travail.
Ainsi, la Cour de cassation applique sa jurisprudence constante en la matière. Elle avait déjà jugé que l’employeur peut accorder à des salariés non gréviste l’octroi d’une prime exceptionnelle justifié par un surcroît de travail (Cass. soc., 3 mai 2011, nº 09-68.297 ; Cass. soc., 8 janv. 1981, nº 79-41.253 ; Cass.crim., 28-11-1978, n°77-92.236, Syndicat CFDT des industries chimiques). En revanche, la cause du versement de la prime doit être étrangère à l’exercice du droit de grève. Ainsi, l’employeur ne peut pas accorder une prime aux non-grévistes du fait de leur non-participation à la grève (Cass. soc., 1er juin 2010, nº 09-40.144).
➜ L’octroi d’une prime exceptionnelle à des salariés non grévistes par l’employeur en raison d’un surcroît d’activité n’est pas discriminatoire ;
➜ La cause du versement doit être strictement étranger au mouvement de grève, sous peine d’être discriminatoire.
Pourquoi se faire assister par un avocat en matière de mouvement de grève ?
Maître David EROVIC, avocat en droit du travail, vous conseillera et vous accompagnera au mieux dans le cadre d’un mouvement de grève pouvant naître au sein de votre entreprise pour faire valoir vos droits et intérêts.
Pour offrir les meilleures expériences, nous utilisons des technologies telles que les cookies pour stocker et/ou accéder aux informations des appareils. Le fait de consentir à ces technologies nous permettra de traiter des données telles que le comportement de navigation ou les ID uniques sur ce site.