Entretien d’embauche ou d’évaluation : rappelle les limites imposées à l’employeur

Dans cet arrêt publié, la Cour de cassation vient rappeler les limites du pouvoir de direction de l’employeur dans le cadre d’un entretien individuel avec un salarié. 
Lien direct et nécessaire avec l'évaluation des aptitudes

Quelques rappels

L’employeur est tenu d’exécuter le contrat de bonne foi, ce qui implique, en vertu des articles L.1222-1 et suivants du Code du travail, de limiter, que ce soit pendant le processus de recrutement et pendant l’exécution du contrat, de limiter les informations demandées à un salarié avec l’évaluation de ses compétences : 

« Les informations demandées, sous quelque forme que ce soit, à un salarié ne peuvent avoir comme finalité que d’apprécier ses aptitudes professionnelles.

Ces informations doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l’évaluation de ses aptitudes.

Le salarié est tenu de répondre de bonne foi à ces demandes d’informations. »

Il faut donc un lien direct et nécessaire avec l’évaluation des aptitudes professionnelles, à défaut, l’employeur commet une faute. 

Un entretien individuel litigieux

En l'espèce

Dans cette affaire, l’employeur avait organisé un entretien individuel d’évaluation incluant :

  • un questionnaire comportemental sans lien direct avec les missions du salarié,

  •  
  • des critères d’évaluation basés notamment sur l’optimisme, l’ honnêteté et le bon sens

Le salarié, estimant que l’entretien s’était déroulé selon des méthodes irrégulières et discriminatoires, a contesté avec l’aide d’un avocat spécialisé en droit du travail son contenu et demandé réparation.

Il obtient gain de cause devant les juges du fond et l’employeur décide de former un pourvoi en cassation. 

La portée de l'arrêt

Position de la Cour de cassation

La Cour de cassation confirme l’arrêt rendu par la Cour d’appel en relevant :

  • D’une part, que « les notions d’« optimisme », d’« honnêteté » et de « bon sens », dont la connotation moralisatrice rejaillissait sur la sphère personnelle des individus, apparaissaient comme trop vagues et imprécises pour établir un lien direct, suffisant et nécessaire avec l’activité des salariés en vue de l’appréciation de leurs compétences au travail, outre qu’elles conduisaient à une approche trop subjective de la part de l’évaluateur pour manquer d’objectivité et de transparence en s’éloignant de la finalité première qui est la juste mesure des aptitudes professionnelles des collaborateurs de l’entreprise. »

 

  • D’autre part, que « la partie expressément consacrée aux « compétences comportementales groupe » ne pouvait être considérée comme secondaire ou accessoire et, d’autre part, que l’abondance de critères et de sous-critères comportementaux, sans qu’il fût possible a priori de savoir dans quelle proportion exacte ils entraient en ligne de compte dans cette évaluation, ni s’il existait réellement en pratique dans leur mise en oeuvre générale une certaine forme d’équilibre avec les critères d’appréciation purement techniques, posait question quant à la garantie d’un système d’évaluation suffisamment objectif et impartial. »

Ainsi, pour la Haute juridiction, ces questions n’ont pas le lien direct et nécessaire avec l’évaluation des aptitudes du salariés. 

En d’autres termes, les outils utilisés dans le cadre d’un entretien individuel :

  • doivent être adaptés à l’emploi occupé ;
  • doivent être proportionnés au but poursuivi (évaluer le travail, pas la personnalité intime) ;
  • ne peuvent porter sur des éléments relevant de la vie personnelle ;
  • ne doivent pas reposer sur des critères subjectifs, non mesurables ou non vérifiables.

L’entretien individuel doit rester un outil professionnel d’appréciation, et non un moyen détourné de sonder la personnalité ou la vie privée du salarié.

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