Le salarié qui abandonne son poste peut désormais être présumé démissionnaire. Toutefois, cette présomption est une notion à nuancer. Pour preuve, l’arrêt de la Cour de cassation du 17 janvier 2024 a posé un principe en matière d’abandon de poste.
Selon une jurisprudence constante, la démission nécessitait une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail. L’employeur n’avait alors parfois d’autres choix que d’engager une procédure de licenciement.
Toutefois, la loi dite « Marché du travail » en vigueur depuis le 19 avril 2023, a instauré une nouvelle forme de rupture du contrat de travail qui ne vaut pas pour les salariés en CDD ou en période d’essai : La présomption de démission en cas d’abandon de poste.
Étant précisé que l’abandon de poste en lui-même est insuffisant pour admettre une démission. Les juges doivent caractériser la volonté de démissionner du salarié au regard des circonstances. (Cass. Soc., 10 juill. 2022, n° 00-45.566).
En l’absence de cette démission claire et non équivoque, l’employeur doit mettre en demeure le salarié de reprendre son poste ou d’apporter la justification de son absence. A défaut, il lui appartient de sanctionner le manquement à ses obligations contractuelles notamment par le biais d’une procédure de licenciement.
Le salarié qui ne se présente plus au travail et demande à être licencié pour bénéficier des indemnités de chômage, après avoir exprimé sa volonté de quitter l’entreprise. Cass. soc., 24 nov. 1999, n° 97-44.183
Le salarié qui, après avoir fait savoir son envie d’être licencié, adopte une attitude violente et ne se présente plus sur son lieu de travail malgré les multiples mises en demeure. Cass. soc., 13 juin 2001, n° 99-42.209
Le salarié qui ne reprend pas le travail malgré les mises en demeure de l’employeur. Cass. soc., 11 juill. 2000, n° 98-45.342
Le refus du salarié de reprendre le travail lorsqu’il est lié à un litige avec son employeur. Cass. soc., 24 nov. 1999, n° 97-42.911 Cass. soc., 22 fév. 2000, n° 98-40.492
Face à un abandon de poste de son salarié, l’employeur doit respecter une procédure pour la validité de la démission pour abandon de poste :
L’employeur demande la raison pour laquelle le salarié est absent et précise le délai dans lequel ce dernier est tenu de reprendre son poste. Il doit être supérieur à 15 jours à compter de la date de présentation de la mise en demeure. (art. R. 1237-13 du Code du travail).
l’employeur rappelle également qu’à l’issue du délai imposé, le salarié ne reprenant pas son poste ou ne justifiant pas d’un motif légitime sera présumé démissionnaire. Ainsi, il ne pourra prétendre à une indemnité chômage.
Après cette mise en demeure, l’employeur fait face à trois hypothèses :
• Le salarié reprend son poste dans le délai imparti : la procédure engagée s’interrompt et le salarié n’est plus présumé démissionnaire ;
• Le salarié ne répond pas, ne reprend pas son poste, n’apporte pas de justificatif à son absence : le salarié sera présumé démissionnaire et sera privé des allocations de chômage sauf s’il obtient gain de cause devant le conseil de prud’hommes en cas de contestation ;
• Le salarié répond et justifie d’un motif légitime :
Dans un arrêt du 17 janvier 2024, la Cour de cassation a affirmé que le licenciement pour faute grave du salarié qui abandonne son poste n’est pas automatiquement justifié au regard des circonstances.
En l’espèce, le salarié bénéficiant d’une ancienneté de 22 ans était autorisé à solder l’ensemble de ses droits à congés pour faire face à une situation familiale complexe. Puis, avant son retour prévu dans l’entreprise, le salarié avait sollicité un congé sans solde sans acceptation de la part de son employeur. L’employeur a mis en demeure l’intéressé de justifier son absence. Le salarié ayant abandonné son poste, a fait l’objet d’un licenciement pour faute grave.
La Cour de cassation affirme que ce licenciement pour faute grave est injustifié en l’espèce. En effet, après avoir constaté que l’absence injustifiée du salarié était établie, les juges ont pu retenir à juste titre au regard des circonstances que cette absence ne rendait pas impossible le maintien du contrat de travail. En effet, le salarié bénéficiait d’une grande ancienneté, d’un passé disciplinaire exemplaire et d’une nécessité de porter assistance à sa mère âgée, malade et isolée.
Depuis le 19 avril 2023, la démission du salarié qui abandonne son poste de travail peut être présumée. L’employeur est d’ailleurs en droit de le sanctionner par le biais d’un licenciement pour faute grave pour le manquement à ses obligations contractuelles. Toutefois, la validité de ce licenciement n’est pas systématique.
Pour preuve, l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 17 avril 2024 affirme que le licenciement pour faute grave du salarié qui abandonne son poste peut être injustifié au regard des circonstances.
De ce fait, ne constitue pas une faute grave, l’absence prolongée du salarié bénéficiant d’une grande ancienneté, d’un passé disciplinaire irréprochable, motivée par la nécessité de porter assistance à un proche âgé, malade et isolé.
Le Cour affirme le principe selon lequel, face à un abandon de poste les circonstances sont importantes.
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