La synthèse d’un rapport d’enquête permet-elle un débat contradictoire ? 

enquête contradictoire
Sur la procédure de licenciement

Quelques rappels

Lors du licenciement d’un salarié, il convient de respecter une procédure stricte.

Il faut tout d’abord convoquer le salarié à un entretien préalable afin qu’il puisse s’expliquer sur les griefs reprochés. Cette convocation doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge. Une mise à pied conservatoire du salarié est possible durant la procédure. L’employeur doit veiller à respecter un délai minimum de 5 jours ouvrables entre la remise de la convocation à l’entretien et la date de la tenue de l’entretien. (Article L1232-2 du Code du travail).

Lors de l’entretien l’employeur expose les différents griefs reprochés au salarié et recueille son explication sur ceux-ci. Le salarié a la possibilité de se faire assister lors de cet entretien par une personne appartenant à l’entreprise ou par un conseiller choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.

L’article L1232-6 du Code du travail précise que la notification du licenciement au salarié doit se faire par lettre recommandée avec accusé de réception et doit contenir les motifs du licenciement. L’envoi de cette notification doit intervenir dans un délai de 2 jour ouvrable et 1 mois après la tenue de l’entretien.

La procédure énoncée ci-dessus est la procédure légale, mais une convention collective peut modifier les délais ou préciser les modalités de cette procédure.

Dans les faits

En l'espèce

En l’espèce, la convention collective applicable instituait la tenue d’une réunion d’un conseil de discipline afin qu’il rende son avis sur les sanctions prévues en cas de fautes disciplinaires et notamment en cas de licenciement.

L’employeur a effectué une enquête interne avant d’engager la procédure de licenciement du salarié. Il alors remis une synthèse de cette enquête au salarié et au conseil de discipline.  

Après décision du conseil, le salarié a été licencié pour cause réelle et sérieuse en raison de nombreuses connexions réalisées sur le compte d’une cliente ainsi que des nombreux appels passés avec cette même cliente à l’aide de son téléphone professionnel.

Néanmoins, le salarié, par l’intermédiaire de son avocat en droit du travail conteste son licenciement et, à l’aide de son avocat en droit du travail, saisit le conseil des prud’hommes afin de demander des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu’une indemnisation en réparation du préjudice subi.

Il invoque notamment le fait que son employeur n’a jamais fourni, ni à lui, ni au conseil de discipline, le rapport de l’enquête interne sur lequel son licenciement a été engagé. La remise seulement d’une synthèse de cette enquête ne permettrait pas de discuter des faits reprochés. Cela constitue une irrégularité de procédure qui empêcherait le salarié d’assurer utilement sa défense et qui exercerait une influence sur la décision du conseil. En effet, il n’aurait pas été possible de discuter des modalités de traçage des connexions et des appels ainsi que de leur temporalité et de leur fréquence, alors même que le salarié les conteste fermement.

La cour d’appel a précisé que la synthèse était suffisamment précise et permettait une véritable discussion des faits reprochés au salarié « comme en atteste la mention du nom de chaque participant en ce compris celui du salarié et du représentant du personnel qui l’assistait ». Elle a alors débouté le salarié de toutes ses demandes.

Le salarié, insatisfait de cette décision, s’est pourvu en cassation.

Sur le respect du débat contradictoire

Position de la Cour de cassation

La Cour constate la procédure particulière de licenciement mise en place par la convention collective applicable.

Ainsi, il est rappelé que le conseil de discipline doit se réunir pour rendre son avis sur la nécessité du licenciement. Il recevra le dossier du salarié au moins 8 jours avant la date de la réunion. De même, l’employeur doit transmettre dans les mêmes délais son dossier au salarié.

Par conséquent, la Cour énonce que l’employeur n’est pas dans l’obligation de transmettre l’entièreté du rapport de l’enquête, il doit seulement transmettre le dossier du salarié contenant les éléments suffisamment précis pour permettre un débat contradictoire.

Ainsi, la remise d’une synthèse du rapport de l’enquête interne contenant l’ensemble des éléments rapportés par les auditeurs et le compte rendu de l’entretien du salarié avec le responsable de l’enquête est considéré comme suffisamment précise. Elle peut permettre une véritable discussion des faits reprochés.

En conséquence, la Cour confirme qu’il n’y a aucune irrégularité de procédure. Le salarié n’est donc pas fondé à demander des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ni l’indemnité pour irrégularité de procédure de licenciement.

A retenir

La transmission de l’intégralité du rapport d’enquête n’est pas obligatoire dès lors que la synthèse contient des éléments suffisamment précis permettant d’avoir une véritable discussion sur les faits reprochés. Le débat contradictoire est alors possible.