Recevabilité des demandes nouvelles en appel : piqure de rappel de la Cour

Par deux arrêts rendus le 25 juin 2025, la Cour de cassation rappelle les règles relatives à la recevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel en analysant la recevabilité de plusieurs demandes formulées par des salariés devant la Cour. 

Quelques rappels

La fin du principe d'unicité d'instance

L’ancien article R.1452-7 du Code du travail qui prévoyait que « les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel » a été abrogé par le décret du 20 mai 2016.

Avant cette abrogation, dès lors qu’une instance était introduite devant une juridiction prud’homale, toute demande nouvelle afférente au contrat de travail en cause pouvait être formulée à tout moment de la procédure, y compris en appel pour la première fois.

Il s’agissait d’une dérogation au droit commun des procédures civiles.

Depuis cette abrogation, l’unicité d’instance devant les juridictions prud’homales a été supprimée et il appartient en conséquence au salarié de formuler toutes ses demandes au moment de sa saisine.

Les demandes additionnelles ou reconventionnelles formulées en cours d’instance doivent désormais se rattacher « aux prétentions originaires par un lien suffisant », conformément à l’article 70 du Code de procédure civile.

A défaut de lien suffisant, la demande nouvelle est irrecevable et le juge l’écartera sans analyser son bienfondé.

A titre d’exemple, une demande en reconnaissance d’une situation de travail dissimulé n’a pas de lien suffisant avec les demandes formulées au titre d’heures supplémentaires. Et pour cause, le travail dissimulé, qui est un délit pénal et requiert la caractérisation d’un élément matériel et intentionnel, n’a aucun lien suffisant avec une demande d’heures de travail effectif qui n’auraient pas été rémunérées.

A l’inverse, une demande en contestation d’un licenciement abusif a un lien suffisant avec une demande préalable de résiliation judiciaire.

En l'espèce

Un lien suffisant?

Dans ces deux affaires, des salariés avaient formulé en cause d’appel des demandes nouvelles par rapport à leurs demandes en première instance devant le Conseil de prud’hommes. 

  • L’un avait ainsi sollicité la requalification de son CDD en CDI en plus de la demande de rappel de salaire qu’il avait formulé initialement au titre de son CDD
  • Le second avait sollicité un remboursement de frais professionnels après avoir initialement demandé le paiement de rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires, ainsi qu’un paiement d’une rémunération variable 

La Cour de cassation, rappelant que la demande subsidiaire doit tendre aux mêmes fins que la demande initiale va juger que :

  • La demande de requalification d’un CDD en CDI n’a pas de lien suffisant avec une demande de rappel de salaire et est donc irrecevable 
  • La demande de remboursement de frais professionnels n’a pas non plus de lien suffisant avec une demande de rappel de salaire, compte tenu de l’absence de caractère salarial à celle-ci 
  • La demande de paiement de rémunération variable a quant à elle un lien suffisant avec la demande de rappel d’heures supplémentaires 

 

Attention aux demandes nouvelles

Un enjeu important et des conséquences parfois irrattrapables

Ces arrêts sont importants dans la mesure où si des demandes nouvelles n’ont pas un lien suffisant avec les demandes initiales, celles-ci seront déclarées irrecevables et rejeté de facto, sans analyse du bienfondé de celle-ci. 

En pareille hypothèse, le salarié ne peut qu’envisager de saisir le Conseil de prud’hommes pour les formuler, si toutefois ce dernier n’est pas prescrit.

C’est la raison pour laquelle, en cas de doute, il est plus prudent de réaliser une nouvelle saisine prud’homal des demandes nouvelles pour ensuite solliciter la jonction d’instance en cours de procédure. Cela permet ainsi de préserver les délais d’action. 

Un doute, une question sur la recevabilité des demandes nouvelles? Contactez votre avocat en droit du travail pour qu’il puisse vous accompagner!