Licenciement d’une salariée enceinte et risques psychosociaux avérés empêchant le maintien du contrat

La Cour de cassation apporte une précision s’agissant de la protection de la salariée enceinte. L’impossibilité de maintenir le contrat d’une salariée enceinte peut être reconnue en cas de refus d’une nouvelle affectation justifiée par l’existence de risques psycho-sociaux.

Quelques rappels du cadre juridique de la protection de la salariée enceinte

Selon larticle L1225-4 du Code du travail l’employeur ne peut rompre le contrat d’une salariée enceinte.
Cette protection s’applique pendant toute la suspension du contrat liée au congé maternité, qu’elle utilise ou non ce droit. Elle couvre aussi les congés payés pris juste après le congé maternité. La protection continue pendant les dix semaines suivant ces périodes.

Cependant, l’employeur peut licencier en cas de faute grave, non liée à la grossesse.
Il peut aussi rompre le contrat s’il prouve son impossibilité de le maintenir pour un motif étranger à la grossesse ou l’accouchement. Dans ce cas, la rupture ne peut être notifiée ou prendre effet pendant les périodes de suspension mentionnées au premier alinéa.

Enfin, l’article L1225-71 du Code du travail précise que tout licenciement violant ces règles est nul.

Une salariée enceinte confrontée à des risques psychosociaux sur son lieu de travail

EN L'ESPÈCE

L’employeur a dispensé d’activité la salariée après que plusieurs membres de son équipe ont dénoncé une dégradation de leurs conditions de travail. Ils ont également signalé l’existence de risques psychosociaux liés à son retour à son poste.

Dans la continuité de ces signalements, le rapport du CHSCT a confirmé la présence de risques psychosociaux graves. Il a souligné que ces risques concernaient à la fois les collègues de travail et l’intéressée elle-même, en cas de réintégration dans son ancien poste.

Pour tenter de résoudre la situation, l’employeur lui a proposé un poste équivalent dans un autre établissement, conforme à ses compétences et à son niveau hiérarchique. Ce poste a toutefois été refusé.

Par la suite, elle a été convoquée le 17 mars 2017 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, prévu pour le 28 mars. C’est à cette occasion qu’elle a informé l’employeur de sa grossesse.

Malgré cette information, le licenciement a été prononcé le 24 avril 2017, au motif de l’impossibilité de maintenir le contrat de travail.

Estimant cette décision injustifiée, l’intéressée a alors décidé de contester son licenciement.

 

La Cour de cassation confirme la décision de la Cour d’appel rendue précédemment. L’employeur, tenu à son obligation de sécurité et de prévention des risques psychosociaux, a proposé un poste équivalent. Ce poste correspondait aux compétences et au niveau hiérarchique de la salariée, mais dans un autre établissement. Cependant, la salariée a refusé cette proposition d’affectation.

En conséquence, l’employeur ne pouvait pas la maintenir à son poste initial. Cela aurait exposé ses collègues et elle-même à des risques psychosociaux importants. La Cour considère donc que le licenciement n’était pas lié à l’état de grossesse. L’employeur se trouvait réellement dans l’impossibilité de maintenir le contrat de travail.

PORTÉE DE L'ARRÊT

Une précision sur les limites à la protection contre le licenciement

La Cour de cassation rappelle un principe fondamental : une salariée enceinte peut être licenciée si le contrat ne peut être maintenu. Toutefois, ce motif doit être indépendant de sa grossesse.

Elle précise notamment qu’une impossibilité existe lorsque la salariée refuse une autre affectation proposée par l’employeur. En effet, celui-ci est tenu à une obligation de sécurité et doit prévenir les risques psychosociaux.

Ainsi, l’employeur ne peut pas maintenir la salariée à son poste si celui-ci présente de tels risques. Par ailleurs, dans tous les cas, la rupture du contrat ne peut être notifiée ou prendre effet pendant les périodes de suspension.

Ces périodes correspondent à celles mentionnées au premier alinéa de l’article L1225-4 du Code du travail. En conséquence, cette jurisprudence doit être prise en compte car elle élargit les cas où le licenciement d’une salariée enceinte est possible.

Que vous soyez une salariée enceinte faisant face à un licenciement, ou un employeur ayant une salariée dans cette situation, il est essentiel de bien comprendre vos droits et obligations. De ce fait, n’hésitez pas à contacter votre avocat spécialisé en droit du travail.