Heures supplémentaires : la Cour de cassation rappelle que la charge de la preuve est partagée

La Cour de cassation rappelle qu’en cas de litige relatif à l’accomplissement des heures supplémentaires, le juge ne peut faire peser la charge de la preuve sur le seul salarié et doit former sa conviction à partir des éléments produits par les deux parties.

Quelques rappels

La charge de la preuve en matière d’heures supplémentaires

Aux termes de l’article L3171-2 alinéa 1 du Code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Aux termes de l’article L3171-3 alinéa 1 du Code du travail, l’employeur tient à la disposition de l’agent de contrôle de l’inspection du travail mentionné à l’article L.8112-1 les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié.

L’article L3171-4 du Code du travail précise qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

En l'espèce

Un désaccord sur des heures supplémentaires non rémunérées

Dans cette affaire, un salarié a été licencié le 1er septembre 2017. Il a saisi le conseil de prud’hommes le 1er mars 2018 afin d’obtenir le paiement de diverses sommes, dont une indemnisation au titre des heures supplémentaires.

La cour d’appel rejette sa demande. Elle relève d’abord que le forfait convenu entre les parties ne précisait ni le nombre d’heures incluses, ni la rémunération correspondante. Ce forfait était donc inopposable au salarié, ce qui ouvrait droit à une réclamation au titre des heures supplémentaires. Toutefois, la cour d’appel constate que le salarié n’a fourni aucun décompte des heures effectuées.

Elle considère que l’inopposabilité de la clause ne suffit pas, à elle seule, à prouver qu’il a systématiquement travaillé 40 heures par semaine. En l’absence de décompte ou d’éléments suffisamment précis, elle estime que la demande du salarié n’est pas fondée.

Portée de l'arrêt

Le juge doit former sa conviction à partir des éléments produits par les deux parties.

La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel dans un litige portant sur des heures supplémentaires non rémunérées. Elle rappelle que, lorsqu’un litige porte sur l’existence ou le nombre d’heures de travail accomplies, le salarié doit présenter des éléments suffisamment précis pour appuyer sa demande. Ces éléments doivent concerner les heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies. Ils doivent permettre à l’employeur, qui contrôle la durée du travail, de répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme ensuite sa conviction en tenant compte de l’ensemble des éléments présentés par les deux parties.

En l’espèce, le salarié avait fourni des éléments suffisamment précis permettant une réponse de l’employeur. Ce dernier n’a pourtant produit aucun élément de contrôle de la durée du travail. La charge de la preuve en matière d’heures supplémentaires ne peut donc reposer uniquement sur le salarié.

Cette solution s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence antérieure. Elle évite que la preuve ne pèse exclusivement sur l’une ou l’autre des parties. La Cour de cassation juge déjà que le salarié doit seulement apporter un commencement de preuve pour étayer sa demande. Ce commencement peut être un simple décompte manuscrit calculé mois par mois. (Cass. soc., 25 févr. 2004, n° 01-45.441 ; Cass. soc., 24 nov. 2010, n° 90-40.928).

Pour davantage d’informations relatives aux heures supplémentaires, n’hésitez pas à contacter votre avocat en droit du travail !